Quels sont d’après toi les défis principaux de la coopération internationale ?
Le principal défi des organisations humanitaires est la baisse des financements face à l’augmentation des besoins : nourriture, eau potable, soins de santé. Le second défi est donc de planifier avec les communautés et définir ensemble les priorités et d'agir là où l'impact sera le plus immédiat et le plus significatif.
FH Suisse a soutenu les coopératives de caféiculteurs au Nord du Burundi dans la province de Kayanza pour la production durable de café. Quel est le potentiel de développement de la caféiculture ?
La caféiculture offre un fort potentiel : 8 millions de Burundais vivent du café, qui représente plus de 75 % des recettes d’exportation. Il s’agit d’un café très apprécié à l'international et le Burundi en a fait sa spécialité. L'idée est de produire de façon durable avec le label Rain Forest Alliance qui est certifié quand on applique des méthodes et des pratiques agricoles durables. L’objectif est d’aider les coopératives de producteurs à obtenir des labels de qualité afin qu’elles puissent vendre à meilleur prix et d’intégrer des pratiques agroécologiques comme l’agroforesterie, qui enrichit les sols et améliore la qualité du café en associant caféiers et arbres fruitiers dans le même champ pour avoir des revenus complémentaires.
Est-ce-que tu pratiques aussi la caféiculture ?
Malheureusement non, car je ne suis pas originaire de la région où l’on pratique la caféiculture. Mais si j'étais né dans une de ces régions, je serais dans le café. Cela dit, je suis fermier et je m'occupe de la culture d'autres produits comme la pomme de terre, le maïs, et le haricot.
As-tu l'occasion de former d'autres paysannes et paysans ?
Oui, au village, je fais la formation d'autres fermiers et je suis un fermier - multiplicateur de semences de la pomme de terre, du maïs et du haricot. Ces semences sont certifiées. Cela donne l'occasion aux communautés aux alentours d'avoir accès aux semences de qualité.
Pourrais-tu nous partager un ou des parcours qui t’ont marqué ?
Parmi les rencontres que j’ai faites, le parcours d’Adélaïde, fermière modèle formée par FH, m’a beaucoup impressionné. Cette paysanne a transmis ses connaissances agricoles autour d’elle à grande échelle. Elle produit ses propres semences et continue d’inspirer de nouvelles formatrices. Aujourd’hui autonome, elle finance les études de ses enfants et possède une maison équipée en eau courante. Son parcours est magnifique car en tant que fermière modèle durant des années, elle a enseigné beaucoup de personnes qui sont devenues formatrices à leur tour et qui commercialisent aujourd’hui leurs semences. Elle illustre l’impact durable des formations agricoles et son effet multiplicateur. Je suis fier et heureux d’être le témoin de ces changements.
Il y a aussi le parcours de ce fermier ougandais qui a pu installer une installation de biogaz chez lui. Dans sa maison, il cuit ses aliments avec ce qu’il produit et il fertilise ses cultures avec le reste. C’est un autre exemple de transformation qui représente un modèle de réussite. Ce fermier ougandais a plus de revenus qu’une autre personne active sur le marché du travail et qui a des diplômes universitaires.
Je vous invite à visionner le documentaire « La Terre, Mon amie »* réalisé par FH Suisse. Vous y apprendrez davantage sur l’approche de FH Suisse et découvrirez encore d’autre parcours intéressants.
Tu as fait partie de FH Burundi pendant 15 ans, peux-tu nous en dire plus sur ton parcours professionnel ?
J’ai un parcours d'ingénieur en radiocommunication. J'ai exercé dans la radio nationale comme ingénieur et aussi comme chef de département commercial et marketing. J’ai par la suite pris la direction de la carrière humanitaire en intégrant une commission nationale qui était chargée de la réinstallation et de l'insertion des rapatriés burundais à la fin de la guerre civile. C'est à ce moment que j’ai fait la connaissance de l’association Food for the Hungry qui était déjà au Rwanda et qui voulait ouvrir un bureau au Burundi. J’ai été le premier à être recruté d’abord comme consultant pour les démarches de son agrément au Burundi. Après son agrément en Mars 2026, j’ai été recruté en Mai 2026 et j’ai évolué avec FH Burundi de 2006 à 2021, en occupant différents postes : coordination et planification, développement des ressources, suivi et évaluation des programmes et responsable de la sécurité alimentaire. Dans ce cadre, j’ai été en première ligne pour la gestion des projets agricoles financés par la Fédération genevoise de coopération (FGC) et d’autres donateurs. Les questions de l'agroécologie et de la souveraineté alimentaire ont été introduites dans ce contexte et se sont concrétisées par l’organisation de 4 ateliers internationaux de formation à l’agroécologie que j’ai coordonnés avec FH Suisse entre 2013 et 2017 au Burundi, Rwanda, en Ouganda et au Kenya. Puis est né un projet transfrontalier « Réseau de fermiers agroécologiques dans les pays des Grands Lacs (R D Congo, Rwanda, Burundi, Ouganda) dont la coordination des activités m’a été confiée. La coordination d'une même activité dans 4 pays différents est une expérience très enrichissante. En 2021, j’ai pris ma retraite après 15 ans de service auprès de FH Burundi. Aujourd’hui, je continue à travailler en tant que consultant, notamment pour la FAO. J’ai rejoint FH Suisse en juillet 2025 en tant que Coordinateur du suivi des projets financés par FH Suisse en Afrique.
Merci beaucoup pour cet entretien.
* Visionner notre documentaire: « La Terre, Mon amie » sur notre chaîne Youtube "FH Suisse – Food for the Hungry".
Vous y apprendrez davantage sur l’approche de FH Suisse et découvrirez d'autres portraits.
Picture: Prosper Niyonsaba, et d’autres membres de l’équipe de FH Burundi, Jean Nibayubahe et Roger Zürcher de FH Suisse.
